Nuit 1 - Balade nocturne

La nuit avait envahit les quais depuis une heure déjà lorsque Mikami sortit de son logement. Il portait toujours le même costume depuis le matin, et également en main la même serviette de travail. Il regardait autour de lui, la rue était calme. Il ferma les yeux et ajusta ses lunettes sur son nez d'une pression de son index.
Il marcha à vive allure le long du canal, et bifurqua aussitôt que possible vers la station de Fuyuki. D'aucun sait qu'à pareilles heures la fréquentation d'un tel lieu laissait à désirer, il risquait alors de faire des mauvaises rencontres. Mais l'homme semblait peu s'en soucier. Il ralentit sa marche lorsqu'il arriva à proximité de la gare, et se mit à sonder rues après rues, ruelles après ruelles. Il s'arrêta un instant pour remettre en place son bouton de manchette, et profita de ce répit pour déclarer à haute voix, comme s'il se parlait à lui même :

<< Voyez-vous Monsieur ce groupe de trois jeunes au fond de la rue ? Délinquance juvénile classique. J'ai déjà eu leur dossier plusieurs fois ente les mains. Ils ne sont pas dans le moule et ne le seront jamais. >>. Il marqua une nouvelle pause pour ajuster son nœud de cravate, et continua. << Il ne veulent pas de la société et la société ne veut pas d'eux. Ils sont aussi incurables qu'une tuberculose infantile. Ils n'ont aucune famille qui les regretterait, parfois parce qu'elles ont renié jusqu'à leur existence même. >>

Il continua sa marche, posément, l'air décontracté et assuré, en direction du groupe de jeune qu'il avait remarqué. Il arrivait à leur rencontre, dépassa leur hauteur et s'en éloigna de quelques mètres.

<< Pas si vite le manchot ! >> hurla dans son dos celui qui semblait être le chef.

Mikami s'arrêta net. Ses bras restaient ballants le long du corps, sa tête baissée regardait ses souliers. Une tâche maculait le cuir de sa chaussure droite mais il n'était pas le moment de la nettoyer. Un groupe de jeunes délinquants voulait le prendre à parti. Il devrait être transis de peur. Au lieu de cela, il gardait les yeux fermés dans une plénitude et un soulagement complet et sourit avec une douceur incroyable pour pareille situation.

Il se retourna.

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La nuit avait envahi Fuyuki. Les rues étaient calmes, et Mikami se promenaient dans les environs de la gare. À ces heure-là, il fallait dire que ce n’était pas forcément l’endroit le mieux fréquenté de la ville ; exactement l’inverse même. En vérité, le Magus était à la recherche de ce genre de problèmes. Lorsqu’il aperçut un groupe de délinquant non loin, il se dirigea volontairement vers eux et les ignora royalement, attirant ainsi leur colère. Ces derniers interpellèrent l’homme de manière agressive – ce dernier se retourna calmement. Juste derrière lui se matérialisa un homme habillé d’un costume noir, les cheveux longs, et le regard triste.

Nuit 1 - Balade nocturne Chs

Les délinquants, surpris par la subite apparition, ne remarquèrent pas immédiatement l’épée longue dans la main de l’homme.

- Puissiez-vous rapidement trouver le repos dans un monde meilleur.

Le Servant saisit son épée à deux mains, et dans un mouvement parfait, décapita le premier délinquant. Un coup net et précis, la tête roula sur le côté comme si c’était la chose la plus naturelle – le sang jaillit. Les deux autres délinquants ne crièrent pas encore, et restèrent sans voix devant ce qu’il venait de se passer. L’épée décrit un deuxième arc de cercle, une deuxième tête roula – le sang jaillit. Un cri s’échappa, le dernier garçon commença à faire bouger ses jambes. Un troisième jet de sang, la tête roula – un arc de cercle. Les deux hommes en costumes étaient couverts de sang, au milieu de la ruelle – trois cadavres. Le Servant avait les yeux posés sur les cadavres au sol.

- Des âmes de cette qualité ne suffiront pas éternellement, mais la justesse de l’acte permet de compenser cela.

Les morts avaient été propres, cela était le plus important aux yeux du Servant.

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Mikami peut ressentir une présence magique à quelques rues d’ici.

Mikami regardait, impassible la scène qui se déroulait sous ses yeux. Il ne sourcilla point lorsque l'épée de son servant fendit furieusement les airs, il ne vacilla point lorsque les têtes des jeunes hommes quittèrent leurs corps dans une effusion de sang, il ne trembla point non plus lorsque ses sens de magus l'alertèrent.

Une présence, une source de pouvoir, l'inquiétait. Elle était suffisemment forte pour lui indiquer qu'une cible, très potentiellement ennemie se rapprochait. Un détail d'envergure, oxymorique, l'inquiétait cependant. Il doutait que la configuration du terrain soit à son avantage, aussi pris t-il l'initiative.

<< Monsieur, dissimulez-vous et suivez-moi par les toits. Une présence magi se rapproche. Je ne suis pas sorti chercher l'affrontement ce soir, faute de préparation adéquate. Vous couvrirez donc mes arrières depuis une hauteur certaine pendant que j'emprunterai des ruelles qui nous mènerons sur le port. Nous aviserons alors le reste à ce moment. >>

N'attendant pas la réponse de son servant, Mikami trempa de sa main gauche, portant les sceaux de commandement conférés par le saint Graal, dans le sang encore déversé par les palpitations cardiaques des pauvres bougres étêtés. Il incanta alors un sortilège, qu'il maintint alors qu'il étalait le sang abondant sur une surface généreuse, barrant une bonne partie de la voie passante.

<< Je suis la vie, je suis la mort. Aqua benedicta, immundam aquam. Je suis le sang versé, la puissance brute. Terribilis afflictionem. >> (en français dans le texte).

Le sortilège n'était qu'un simple et vulgaire piège. Le catalyseur utilisé était même de piètre qualité, mais avec un peu de chance il se déclencherait et causerait à sa cible un affaiblissement physique suffisant pour pouvoir le ralentir et prendre de l'avance.
Une fois son affaire terminée, ce qui ne fut pas immédiat, Mikami sortit, usant de sa main droite, une paire de gants noirs dont il se couvrit les mains. Il ramassa la serviette qu'il avait posé au sol, et repris en sens inverse son chemin. Sans se presser. A son pas habituel, sûr, déterminé. Ses talons résonnaient dans le grand néant impénétrable des pénombres environnantes.

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Le servant hocha la tête puis se dématérialisa.

Mikami ressent une puissance magique déferler rapidement aux alentours de la ruelle qu'il avait quitté, puis plus rien. Impossible de savoir si piège à fonctionné ou non. Pas de nouvelles du Servant sur les toits, bonne nouvelle.

Mikami continuait sa marche, tout en jetant à chaque angle de ruelle qu'il empruntait un regard non pas inquiet mais du moins furtif. Il ne sentait plus la menace magique depuis un moment déjà, seule l'aura de son servant planait dans les airs. Jusqu'à ce que...

Au détour d'une rue piétonne, Mikami se plaqua brusquement contre un mur. Il détectait une présence magique à quelques encablures de sa position. La présence semblait diffuse, ou plutôt double. Voire un petit peu des deux. Tout cela était suffisant pour le troubler et lui donner l'envie d'enquêter sur le phénomène. Il appela son servant auprès de lui, tout en lui ordonnant de dissimuler son apparence. Il continua sa marche, se rapprochant toujours plus des (?) sources de mana. C'est alors qu'il entendit des voix. Il prêta toute l'attention dont il était capable. Les clameurs se faisaient trop lointaine. Il devra s'exposer s'il veut en savoir plus. Il demanda alors à son servant de reprendre la route des toits, et d'assurer sa sécurité depuis la-haut. Mikami tira de son sac deux fioles, contenant chacune un liquide sombre et épais. Il mis la première dans la poche torsale de son veston, et dévissa le bouchon de la seconde, puis inséra la pointe de son porte-plume jusqu'à en toucher le fond. Il actionna la pompe mécanique du stylographe, qui but lentement le liquide. Un éclair de froideur étincelât dans les lunettes à fine monture du magus en complet gris, il actionnait machinalement ses membres pour répéter des gestes qu'il connaissait par cœur. Il reposa la fiole quasi vide dans sa serviette. Il tint le réservoir du porte-plume entre ses deux mains, et répéta la précédente incantation qui servit à piéger un potentiel ennemi. Le liquide contenu dans le réservoir devint alors imprégné de la magie de Mikami. Il porta enfin la plume à sa poche, la même poche qui contenait également la fiole pleine. Il ne fit dépasser que la petite flèche métallique enserrée dans le capuchon.

Il avança enfin, se dévoilant au grand jour.
Il aperçut alors une scène d'une violence inouïe (bien qu'il ne sembla pas impressionné). Une effusion de sang terrible en pleine rue, et au milieu de se massacre, trois personnages se toisant en chiens de faïence. Il était évident que parmi eux se trouvaient une maîtresse et son servant, mais le troisième...
Le troisième inquiétait Mikami. Il ressentait une aura autour de lui. Faible, mais présente. Et le spectacle bestial qu'il avait laissé voir ne laissait planer aucun doute : il était un servant. Fou. Et dangereux. Mais plus encore alarmant, il ne ressentait la puissance d'aucun maître dans les environs.

Il avança encore, martelant de son pied les pavés de la rue.

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